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Brady Keeper: un parcours incroyable, une histoire improbable et une source de fierté pour toute une nation

PUBLICATION

20 mars 2019  (9h53)
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Brady Keeper est un joueur de défense né à Cross Lake au Manitoba, une réserve à dix heures de route au nord de Winnipeg où vivent 8000 habitants.

Mais qui est donc ce jeune homme dont l'étonnante histoire incite toute une nation à célébrer?

Tout d'abord, Keeper a effectué ses premiers coups de patins sur la patinoire que son père avait l'habitude d'ériger chaque hiver dans leur cour arrière. Durant trois saisons, il a porté les couleurs du Blizzard de la Nation crie Opaskwayak de la Ligue de hockey junior du Manitoba.

En 2016-2017, il s'est mérité le titre du joueur le plus utile en plus d'être élu le meilleur défenseur. Même s'il n'a pas été repêché, son rendement a néanmoins attiré l'attention des Kings de Los Angeles qui l'ont invité à participer à leur camp de développement.

Il a aussi reçu des offres de plusieurs collèges américains. Au final, il a décidé d'accepter celle des Black Bears de l'Université du Maine.

Après seulement deux jours sur le campus du Maine, à l'âge de 20 ans, il a cependant failli tout abandonner à plusieurs reprises; il a même rempli sa carte de crédit en achetant trois ou quatre billets d'avion qu'il n' a finalement jamais utilisés.

Deux hommes ont cependant été là pour l'épauler et le convaincre de ne pas renoncer à son rêve.

Il s'agit de Dean Grillo, son ancien conseiller et maintenant son agent avec l'agence O2K Sports Management, ainsi que Jordin Tootoo, l'ancien joueur d'origine amérindienne qui a disputé 723 matchs dans la LNH en plus d'avoir joué pour la même équipe junior.

« Je lui ai parlé à plusieurs reprises, a déclaré Tootoo, alors qu'il contemplait l'idée d'accrocher ses patins. Il y avait beaucoup de problèmes à la maison et aussi plusieurs choses qui se passaient sur la réserve. Je savais exactement ce par quoi il passait. »

En effet, à son arrivée au campus du Maine, Keeper était déjà père d'un jeune bébé, un garçon Navyn, et beau-père de Napesis, le fils de Shaylyn, sa conjointe.

Le plus gros obstacle pour le nouveau joueur des Panthers était évidemment d'être loin des siens. Tootoo se souvient d'avoir eu une conversation avec lui où il lui avait conseillé de vivre le moment présent.

Il lui avait aussi confié que tous ceux qui le voyaient jouer savaient qu‘il avait les qualités requises pour réussir à jouer dans la LNH. Et il avait raison!

À la fin de sa saison recrue avec les Bears, Keeper a reçu des offres de plusieurs clubs de la LNH qui désiraient l'inviter à participer à leurs camps de développement.

Malheureusement, il a dû toutes les décliner puisqu'il a dû rentrer à la maison afin de gagner de l'argent pour faire vivre sa famille. Le scénario s'est répété à la fin de cette saison alors que plusieurs équipes de la LNH lui ont fait des offres de contrat.

Ce sont cependant les Panthers de la Floride qui ont été les plus rapides et qui l'ont convaincu de quitter l'Université du Maine pour joindre leurs rangs. Keeper a affirmé que la décision n'avait pas été facile à prendre puisque ses entraîneurs le traitaient comme s'il était leur propre fils.

Mais il ne pouvait pas tourner le dos à son rêve d'autant plus que les temps étaient durs financièrement.

Il ne lui restait, en effet, que 63 sous dans son compte en banque lorsqu'il a signé son contrat. Quand il a quitté Dallas, il n'avait qu'un habit et son sac à dos. C'est même un de ses mentors qui a défrayé les frais de baggage afin que ses bâtons et son équipement puissent faire partie du voyage en Floride.

Le défenseur de 6 pieds 2 pouces (1m88) et 194 livres (88 Kg) a paraphé lundi son contrat de 2 ans avec les Panthers à titre d'agent libre; signature assortie d'un coquet bonus de 92,500$.

Dans les prochains dix-neuf jours, il recevra environ 95,000$, en plus d'un autre bonus de signature de 92,500$ le 1er juillet. Son agent a affirmé que c'était sans doute l'un des événements les plus cool auquel il avait participé.

Grillo a ajouté avoir des clients qui ont signé des contrats de $60 ou $70 millions, une somme qui assurément change une vie, pourtant, en ce qui concerne Keeper, c'est vraiment le cas.

Et pas seulement pour lui, mais aussi pour les siens qui seront inspirés par sa réussite. Keeper est, en effet, une fierté pour la Nation crie Pimicikamak et le nouveau Panthers en est très conscient.

« Être le premier de la communauté à signer un contrat dans la LNH, a-t-il affirmé, fait en sorte qu'on me voit comme un modèle pour la jeunesse aborigène au Manitoba et partout ailleurs. C'est très spécial pour moi. »

Un fait cocasse s'est cependant produit lorsque Eric Joyce, l'assistant directeur général, a voulu compléter les informations requises lors de la signature dudit contrat.

En effet, lorsqu'il lui a demandé d'où il était originaire, Keeper a répondu en souriant :

« C'est là-haut, mais personne ne sait probablement où c'est. »

Joyce l'a donc interrogé encore puisqu'il avait besoin de renseignements un peu plus précis. Keeper lui a alors rapidement donné le nom de la rue. À nouveau, Joyce a dû le questionner afin de connaître son adresse. Malheureusement, le jeune homme n'a pas pu lui fournir l'information requise.

« Tout le monde sait où tous les autres demeurent, a-t-il déclaré. Nous n'avons pas de numéro de porte. »
Cela ne l'a pas empêché de signer son contrat!

Bien évidemment, le jeune homme était excité d'être là. En fait, il l'était tellement qu'il n'arrivait pas à trouver les bons mots pour exprimer comment il se sentait.

Heureusement, Alfie Michaud, son ancien entraîneur, et aussi un compatriote manitobain, était l'un de ceux qui étaient là pour le supporter lorsqu'il a signé son contrat.

Michaud a d'ailleurs confié que Keeper était tout sourire lorsqu'il a déposé son crayon après avoir apposé sa signature au bas du précieux document.

Interrogé au sujet de son ancien joueur, Michaud a affirmé que Keeper pensait vite, était réactif et faisait bien circuler la rondelle. Il a cependant précisé que, même si ce dernier a beaucoup de potentiel, c'est encore un talent brut. Joyce, l'assistant DG est dû même avis. « Il a un bon tir et un bon instinct offensif.

C'est un joueur physique, un talent brut qui doit cependant se développer » a-t-il précisé.

« Je ne pense pas qu'il soit prêt à sauter dans la mêlée et à contribuer dès demain, a-t-il ajouté, mais il va obtenir du temps de glace avec l'équipe. »

Et Joyce a tenu parole.

Keeper a, en effet, patiné avec les Panthers, pour la première fois lors de la pratique d'hier matin sous le regard attentif de Bob Boughner, son nouvel entraîneur-chef.

Même si ce dernier n'a pas l'intention de précipiter son insertion dans l'alignement partant, il va faire en sorte qu'il soit prêt, dans les prochains jours à effectuer ses débuts dans la LNH.

« Je vais travailler fort. Et quand ça sera le bon moment, je sera prêt », a promis la nouvelle acquisition des Panthers.

« Évidemment, il est un peu silencieux et a les yeux grands ouverts » a mentionné Boughner, en parlant du nouveau venu, avant d'ajouter que c'était tout à fait normal.

Ce dernier a même précisé que, lors de l'entraînement matinal, Keeper n'avait pas l'air de quelqu'un qui n'avait pas sa place là. Au contraire!

Le coach a même pu constater que le nouveau no. 25 des Panthers a une bonne coordination main-oeil. De plus, il a un bon tir. Quant à ses passes, elles sont solides et précises.

Mais, ce qu'il a apprécié le plus du jeune joueur, a été son implication durant les divers exercices. C'était donc, selon lui, une bonne décision de lui avoir demandé d'y participer.

Les Panthers désirent que Keeper assiste aux meetings, apprenne le système, fasse l'expérience des échauffements et après ils verront pour la suite des événements.

« Il faut lui donner quelques jours pour s'acclimater, a confié Boughner, et ensuite nous prendrons la décision de l'utiliser ou non. »

Pour Keeper, les prochaines semaines seront donc une question d'apprentissage et de développement afin de voir comment, après une à deux semaines comme joueur professionnel, la situation va évoluer.

Keeper n'a jamais eu l'opportunité de participer à un entraînement de haut calibre durant la saison estivale donc le plan de sa nouvelle équipe est de lui permettre de vivre cette expérience l'été prochain et ensuite le club décidera ce qui est le mieux pour son développement.

Cela pourrait vouloir dire, l'assigner l'automne prochain aux Thunderbirds de Springfield, leur club école dans la LAH.

Mais Keeper, quant à lui, a des objectifs plus élevés.

« Je vais essayer de me tailler un poste dans l'équipe dès l'an prochain » a-t-il avoué. « Je dois seulement travailler fort, comme tout le monde le fait, me présenter l'an prochain et faire en sorte que quelque chose se produise. »

Selon Michaud, Keeper sait d'où il vient et ce qu'il représente pour les siens. Sa communauté a, en effet, au cours des dernières années, connu des moments difficiles.

En 2016, l'état d'urgence a même été décrété après que cinq adolescents se soient suicidés alors que 140 autres ont fait une tentative de suicide durant les semaines qui ont suivi.

Le fait donc de voir qu'un des leurs a réussi représente une source d'espoir pour tous les jeunes de la Nation crie Pimicikamak. Pour célébrer la bonne nouvelle, les étudiants de l'école Mikisew se sont d'ailleurs réunis devant le bâtiment pour danser.

« Ça leur donne de l'espoir. C'est très puissant » a déclaré Jordin Tootoo. Comme l'a d'ailleurs affirmé le no. 25 des Panthers, il est la preuve que n'importe qui peut réussir.

« Si vous y mettez toute votre volonté, travaillez fort tout en restant à l'écart de ce qui est mauvais pour vous, vous pouvez réussir, vous aussi » a-t-il affirmé.

Quant à Joyce, il a déclaré que Keeper est un jeune qui aime visiblement jouer au hockey. Il a toujours le sourire lorsqu'il saute sur la glace. De plus, c'est un excellent joueur d'équipe; la réaction de quelques-uns de ses nouveaux coéquipiers prouve d'ailleurs qu'il a rapidement été accepté.

En effet, ceux-ci n'ont pas hésité à le taquiner au sujet de son nouveau statut de vedette en criant « Tom Brady » lorsqu'ils sont passés derrière lui alors qu'il affrontait, pour la première fois, les journalistes après la fameuse signature. Gageons que Keeper a apprécié sentir qu'il faisait partie de la gang!

«Actuellement, il n'y a que 63 sous dans son compte en banque, ses jambières sont scotchées, mais, à la fin de la journée, il peut jouer » a conclu Joyce.

Selon vous, combien de rencontres Brady Keeper disputera-t-il avec les Panthers de la Floride d'ici la fin de la saison régulière?

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