Pour Brian Burke, analyste de Sportsnet, le Tricolore est l'équipe canadienne qui a le plus de chances de se rendre jusqu'au bout. Pour Mathias Brunet de La Presse, la formation de Claude Julien sera la plus équilibrée que Montréal enverra sur la patinoire depuis 1993. En parallèle, pour Mitch Gallo, analyste de TSN à la radio, le court camp d'entraînement ne permettra pas aux joueurs de la Sainte-Flanelle de développer une chimie. Il ajoute qu'au mieux l'équipe terminera au quatrième rang de sa division, donc évoque une possible exclusion des séries. Finalement, d'autres journalistes s'inquiètent du fait que les vétérans auront de la misère à repartir la machine et que cela pourrait être fatal dans une saison écourtée.
À première vue, ce qui saute aux yeux est la divergence des idées. Habituellement, les journalistes sont quasi unanimes sur l'issue globale de la saison, mais en ce moment, deux extrêmes sont considérés. Rater les séries ou prétendre à la Coupe Stanley? Qui a raison?
Avant de se prononcer, il faut réaliser qu'une année extraordinaire entraîne des situations extraordinaires. La planète traverse l'inconnu, ce qui rend les prédictions plus difficiles. Plusieurs facteurs extérieurs vont brouiller les cartes pour plusieurs formations, et on ignore comment répondront les joueurs. Cette incertitude est peut-être à l'origine de cette si grande divergence, mais quoi qu'il en soit, les quatre affirmations ont du bon. Basons une opinion sur ces propos.
Commençons par celle de Burke. À pareille date l'an dernier, si un journaliste avait dit que le CH était l'équipe canadienne la plus susceptible de gagner la Coupe Stanley, cela aurait déclenché un fou rire général. En effet, le Tricolore se dirigeait beaucoup plus vers les terrains de golf que vers des arénas remplis à pleine capacité au mois d'avril. Mais beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis. Grâce à la COVID-19, le Tricolore a eu un second souffle et en a profité pour surprendre les Penguins et chauffer les Flyers. De plus, Marc Bergevin a été agressif et a grandement amélioré sa formation. Cependant, est-elle rendu au niveau de gagner la première place d'une division toute canadienne et de se rendre jusqu'au bout?
De sérieux doutes peuvent être émis, car il ne faudrait pas oublier les autres bonnes formations au Canada. Les Canucks de Vancouver, malgré de lourdes pertes ont encore un noyau jeune et talentueux et devraient compter sur un bon duo de gardiens de but. On ne peut passer à côté des Flames de Calgary, qui ont enfin un gardien de but de premier plan capable de les transporter jusqu'en séries. Finalement, malgré le fait qu'ils sont décevants années après années, les Maple Leafs de Toronto demeurent une équipe dangereuse en raison du grand talent de ses joueurs.
L'argument de Mathias Brunet est vraiment intéressant. L'équilibre au niveau de la formation est bien meilleur que les années passées et peu de failles sont visibles. Cependant, il y a un élément qui ne sera pas à négliger : la vitesse. La défensive du CH est certes plus imposante physiquement, les nouveaux attaquants le sont aussi, mais il ne faudrait pas oublier ce qui a marqué les bons moments de la Sainte-Flanelle ces dernières années, aussi éphémères étaient-ils. Tout récemment, c'est avec des transitions rapides et un bon échec-avant que le CH a réussi a vaincre les Penguins. L'idéal serait de jumeler cette mentalité avec du jeu robuste, la recette qui a permis au Lightning de soulever la Coupe Stanley.
Pour ce qui est de Mitch Gallo, qui croit que le CH ne terminera pas plus haut que la quatrième place, son argument tient assurément la route. Les nouveaux joueurs n'ont toujours pas joué un seul match, et déjà Montréal s'emballe. Sauf qu'ils ont de l'expérience dans la LNH et améliorent systématiquement l'équipe. Pour ce qui est du court camp d'entraînement et du manque de chimie possible, Gallo n'a pas tort. Cependant, le noyau de l'équipe est resté intact. Les joueurs clés s'assureront que les nouveaux venus s'acclimatent rapidement.
Finalement, il faut considérer le niveau de jeu que le CH a offert dans la bulle à Toronto. Carey Price et Shea Weber, deux vétérans, ont offert de solides performances dès le départ. Les jeunes joueurs ont suivi la parade et ont répondu « présent ». La Sainte-Flanelle pourra-t-elle répéter sa préparation? Si on se fie au préparateur physique de l'organisation, les joueurs ont tout ce qu'il faut pour arriver fin prêts pour le début de la campagne.
Donc, que reste-t-il? Quelle est la réponse à la question? Prétendants ou exclus? Et si la réponse se trouvait entre les deux? Le Tricolore devra assurément composer avec des difficultés extérieures comme les autres équipes, mais en santé, l'équipe a le potentiel de terminer dans le top-3 de la division canadienne. Les ajouts durant la saison morte sont assez importants pour que la formation de Claude Julien effectue un virage de 180 degrés par rapport à la saison dernière. Il est sûr que ces nouveaux joueurs devront rapidement assimiler le système de jeu, mais la saison n'est raccourcie que de 26 matchs.
Alors, où situez-vous le CH dans le classement d'une division canadienne?
Crédits pour les affirmations des journalistes :